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La France, l'Allemagne et le Royaume-Uni seront parmi les premiers pays membres de l'OTAN à compenser l'engagement de plus en plus incertain des États-Unis à garantir la sécurité de l'Europe.
Les implications économiques et de crédit d'une augmentation des dépenses de défense des trois gouvernements seront toutefois mitigées, reflétant leurs différentes positions fiscales et contraintes budgétaires et sociopolitiques.
Le recours à des dépenses militaires financées par la dette affaiblirait les perspectives de crédit de la France et du Royaume-Uni, mais la combinaison d'une flexibilité fiscale limitée et de rendements obligataires plus élevés pourrait encourager les deux gouvernements à procéder aux ajustements budgétaires nécessaires. En outre, les mesures de relance budgétaire de l'Allemagne pourraient avoir des effets d'entraînement favorables sur la croissance, ce qui contribuerait à atténuer l'impact permanent de l'augmentation des dépenses de défense européennes sur les ratios de la dette publique.
L'Allemagne s'appuiera principalement sur l'augmentation des émissions de dette pour compenser les décennies de sous-investissement dans ses forces armées, le nouveau gouvernement ayant obtenu la majorité parlementaire des deux tiers requise pour réformer le frein constitutionnel à l'endettement. Des finances publiques solides, ancrées par un ratio dette publique/PIB de 63 % et un déficit budgétaire de 2,0 % du PIB en 2024, offrent une flexibilité suffisante pour financer une relance budgétaire importante sans augmentation significative des impôts ou réduction des dépenses dans d'autres domaines.
Le Royaume-Uni est susceptible de financer l'augmentation des dépenses de défense par une combinaison d'émissions de dette et d'ajustements budgétaires, étant donné le poids de sa dette publique de 100 % du PIB et son déficit budgétaire de 5,8 % du PIB en 2024. La majorité confortable dont dispose le gouvernement au parlement pourrait lui offrir la souplesse nécessaire pour réduire les dépenses non liées à la défense.
À l'inverse, la capacité de la France à absorber des dépenses de défense plus élevées par le biais d'une émission de dette supplémentaire est limitée, étant donné que le ratio dette publique/PIB est déjà élevé (113 %). Malgré un déficit budgétaire de 5,8 % du PIB, il est tout aussi difficile de procéder à d'autres arbitrages budgétaires en raison du caractère minoritaire du gouvernement, de la forte fragmentation du parlement et du risque relativement élevé d'une nouvelle instabilité politique.
L'augmentation des dépenses de défense (figure 1) en vue d'atteindre un objectif potentiellement révisé de l'OTAN de 3 % du PIB d'ici 2027 signifierait que les dépenses annuelles allouées aux forces armées passeraient à environ 95 milliards d'EUR en France et au Royaume-Uni, et à plus de 140 milliards d'EUR en Allemagne.
Cela représenterait une augmentation des dépenses de défense de 45 milliards d'EUR par an en moyenne jusqu'en 2027 en Allemagne (0,9 point de pourcentage du PIB), qui devrait être presque exclusivement couverte par des volumes de financement plus élevés, sans conséquences importantes pour le crédit.
Toutefois, l'augmentation des volumes de financement annuels de 30 milliards d'EUR en France (0,9 point de pourcentage) et de 20 milliards d'EUR (0,7 point de pourcentage) au Royaume-Uni pèserait sur la viabilité budgétaire, en particulier dans un contexte de conditions de financement moins favorables, ce qui nécessiterait d'éventuels arbitrages budgétaires. Combler cet écart de dépenses pour atteindre un objectif de défense de 3 % du PIB équivaudrait à environ 3 % de ce que la France et le Royaume-Uni allouent aux dépenses de protection sociale et à moins de 2 % des recettes.
Figure 1. Les dépenses de défense représentent une faible part des budgets publics
% du PIB
Note : La protection sociale comprend la santé. Les autres dépenses comprennent les services publics généraux, les affaires économiques, l'éducation, l'ordre public et la sécurité, le logement et les équipements collectifs, et la protection de l'environnement. Source : FMI, Scope Ratings : FMI, Scope Ratings.
Bien que les arbitrages budgétaires en France et au Royaume-Uni puissent partiellement compenser les implications en termes de crédit, nous prévoyons que l'augmentation de l'émission de dette sera le principal moteur de l'augmentation des dépenses de défense dans les trois pays.
Dans l'hypothèse d'une augmentation des dépenses de défense à près de 3 % du PIB d'ici 2027, le ratio dette publique/PIB passerait à 120 % du PIB en France, 109 % au Royaume-Uni et 69 % en Allemagne (figure 2). Il s'agirait d'une augmentation significative par rapport aux niveaux d'avant la crise, notamment pour la France (21 points de base) et le Royaume-Uni (23 points de base).
La trajectoire de la dette de ces deux États souverains est particulièrement exposée à des déficits budgétaires primaires plus importants et à des taux d'intérêt plus élevés déclenchés par la réaction du marché aux plans de réarmement et de dépenses d'infrastructure de l'Allemagne. Les pressions inflationnistes pourraient s'accentuer avec l'augmentation des droits de douane sur les intrants essentiels pour les industries de la défense.
Les programmes de financement annuels devraient donc rester proches de leur niveau record jusqu'en 2027. Les paiements nets d'intérêts devraient dépasser 5 % des recettes en France et 7 % au Royaume-Uni, mais rester inférieurs à 3 % en Allemagne.
Figure 2. La dette publique devrait augmenter, augmentant la pression pour des ajustements budgétaires
Variations en points de pourcentage
Note : 2024 indique un dérapage budgétaire en France. Les marqueurs indiquent les changements cumulés sur 2019-27. Source : FMI, Scope Ratings : FMI, Scope Ratings.
La décision de l'Allemagne de tirer parti de ses importantes mesures de relance budgétaire pourrait également avoir des retombées positives sur la croissance en France et au Royaume-Uni. Ces deux pays ont des capacités militaires et de production de défense comparativement plus importantes, y compris en matière de dissuasion nucléaire.
Cela pourrait se traduire par une croissance légèrement plus élevée et, avec les arbitrages budgétaires, atténuer les conséquences sur le crédit de l'augmentation des dépenses de défense. Toutefois, les retombées économiques régionales potentielles pourraient être limitées par les contraintes administratives et de capacité des fabricants européens. Les plans de réarmement de l'Allemagne pourraient ainsi dépendre davantage de l'augmentation des importations d'armes fournies par les États-Unis.
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